(Dans les deux premiers Fallout ça ne servait strictement à rien d’explorer tous les carrés vu que tous les lieux intéressants pouvaient être dévoilés suite à une discussion avec certains PNJ, mais dans New Vegas il y a tellement de trucs intéressants / fun sur le bord de la route que l’exploration doit prendre 90% du temps de jeu :x)
J’avais pas Internet à l’époque, donc pas d’autre moyen d’être sûr. Tous ces voyages n’ont pas été un pur gaspillage non plus, ça m’a au moins permis de voir toutes les rencontres aléatoires débiles (la quête du Graal, le portail temporel, etc).
Sinon pareil pour Heavy Rain, je crois que j’avais déjà râlé ici sur le sujet d’ailleurs L’autre problème c’est que l’intérêt d’y revenir est très faible, j’attendais plus d’un jeu dont l’intérêt est quand même censé venir des embranchements. En pratique la plupart des choix qui ont un vrai impact sur l’épilogue n’arrivent qu’à 4-5 scènes de la confrontation finale. Jusque là le jeu fait tout son possible pour gommer les conséquences de nos actions et rentrer dans son moule.
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EDIT : Y a quoi dans les nouvelles scènes du jeu ?
http://www.gameblog.fr/news_18997_heavy-rain-les-scenes-coupees-en-video
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(ce que les anglais appellent le plot, et qu’ils distinguent du story, la fabula, il nous manque un terme à nous pour ça, narration ça englobe trop de choses >_<)
Pour autant que je me souvienne il existe un terme français pour ça. Je crois qu’on établit simplement une distinction entre action (l’histoire) et narration (la façon dont elle est racontée). Ou alors j’ai mal compris ce que tu voulais dire.
Sinon Johann je dis ça mais moi aussi j’avais nettoyé tous les carrés des deux maps, avant de me rendre compte que c’était inutile justement (surtout que les rencontres aléatoires dépendent de ta stat de chance en fait: dans Fallout 1 à un moment j’avais fait un perso avec 10 en chance et je me suis tapé toutes les rencontres aléatoires à la suite dans le même voyage une fois que j’avais atteint le niveau requis).
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Le truc, c’est que narration, ça englobe à la fois l’ordre dans lequel est raconté l’histoire et la manière dont elle est racontée (type de la diégèse et de la focalisation notamment). Du coup j’ai toujours tendance à parler de narration pour parler de la structure du récit, mais c’est vrai que ça reste vague depuis que Genette a popularisé le terme et a redéfini les contours de la narratologie. En bref, je sais qu’en critique c’est plutôt vague, et je trouve ça encore plus vague dans le langage de tous les jours. Si je parle à certains de narration, pour eux c’est juste l’histoire (et c’est pas faux, c’est même la première définition qu’on trouve dans beaucoup de dicos, ce qui est logique eu égard aux origines du terme), ou le rythme du récit, ou encore autre chose, et pas forcément la chronologie du récit en opposé à la chronologie de l’histoire précisément. A ce niveau là on commence à rentrer dans des considérations plus pointues en matière de terminologie littéraire, chose dont les gens se moquent pas mal, et donc qui rend l’utilisation du terme de narration un tantinet délicate puisqu’on court le risque d’être mal compris.
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N’importe quoi la conférence 3DS Europe, 1h15 d’interventions soporifiques entre des japonais traduits en direct et des français qui lisent un prompteur, tout ça pour esquiver la question du prix à la fin :x
Sortie le 25 mars 2011 quand même.
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ce que les anglais appellent le plot, et qu’ils distinguent du story
L’intrigue (traduction littérale de plot, mine de rien)
Narration c’est effectivement pas le bon terme, ça désigne la méthode par laquelle l’histoire est transmise, pas le contenu.
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The delivery is justice, and as you know all too well, nothing stops the mail
Narration c’est le bon terme. Ca contient aussi bien la structure du récit que la manière dont il est raconté. C’est même l’une des premières définitions du terme, lorsque narration était encore considéré comme l’une des parties du discours en rhétorique ancienne.
L’intrigue, c’est surtout très schématique (exposition, noeuds, péripéties, résolution…) et ça vise à définir le rôle de chaque partie du récit. On s’attache moins à la manière dont sont agencés les événements qu’à l’identification des-dits événements en “postes” clés. Je dirais même que c’est plus proche du story anglais en fait.
Si on voulait vraiment faire les tatillons, y a Genette qui divise la narratologie en trois parties (enfin, en le résumant très très grossièrement) : l’ordre (ce qui nous intéresse, avec analèpses/prolepses et tutti quanti), la durée (durée et rythme) et la fréquence (répétition ou non d’un événement donné). C’est pas une vérité universelle, mais bon c’est un peu le mec incontournable de l’étude narratologique (Figures III bonjour).
(Ce n’est pas le genre de débats que je m’attends à avoir sur un site de jeux vidéo mais c’est plutôt rigolo je dois dire. )
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L’intrigue, c’est surtout très schématique (exposition, noeuds, péripéties, résolution…) et ça vise à définir le rôle de chaque partie du récit.
Ben… oui. C’est ça le plot, la structure schématique des événements. Story (ou narrative), c’est la narration (d’où le storyboard qui décrit visuellement la narration d’un film). C’est pour ça qu’on appelle plot device (ça par contre je ne saurais pas le traduire) des éléments purement structurels.
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Ben… oui. C’est ça le plot, la structure schématique des événements. Story (ou narrative), c’est la narration (d’où le storyboard qui décrit visuellement la narration d’un film). C’est pour ça qu’on appelle plot device (ça par contre je ne saurais pas le traduire) des éléments purement structurels.
La critique anglaise, je connais moins (d’autant plus qu’elle découle elle-même de la critique formaliste russe je crois, alors là pour moi c’est la grande inconnue), mais lorsque j’avais étudié ça (donc je parle sur le plan littéraire là), c’était clairement de narration dont il était question avec le plot. Et story, c’était l’histoire sur le plan chronologique, une fois qu’on a tout remis dans l’ordre en tant que lecteur, et non l’histoire telle qu’elle va être racontée par le narrateur.
On retrouvait même les trois critères que j’ai cités, à savoir Temporal order, duration et frequency. Ce qui est pas la même chose que de s’intéresser à ce qui constitue les grandes lignes directrices d’un récit (j’entends qu’on ne cherchait à savoir si telle scène constituait en soi une péripétie ou le nœud qui va lancer le récit sur les rails, mais plutôt si telle scène devait être avant ou après telle scène). Identifier les différents mécanismes de l’intrigue et pouvoir les résumer de manière linéaire, c’est ça l’intrigue. Pour être plus prosaïque c’est simplement l’histoire une fois qu’on a isolé et reconstitué ses différentes composantes (d’ailleurs je réalise que dans ma précédente phrase j’ai fait une redondance en utilisant “intrigue” pour dire récit, je pense que c’est assez révélateur). La narration, elle, s’attache réellement à décrypter l’agencement et la structure réelle, à dire que telle scène (qu’il s’agisse du nœud où de la péripétie x) est une analèpse ou une prolepse par rapport à la scène d’exposition, à souligner l’ellipse de vingt ans qu’il y a eu entre deux chapitres, etc. En gros il s’agit surtout de bien faire la distinction entre l’étude de la structure et de l’agencement, et l’analyse et la classification des grandes lignes directrices qui régissent les fictions. Deux choses au fond sensiblement différentes.
Pour le cinéma, je peux rien en dire par contre, je suis pas très cinéphile (enfin je crois, y a Skarn qui a des doutes sur la question ) et j’ai jamais compris grand chose à la production cinématographique et aux techniques qui y sont liées, donc j’irai pas te contredire là-dessus. Mais je serais surpris que la nomenclature cinématographique soit complètement différente quand même.
(Tous ces mots pour des histoires de définition, trop bien !)
Johann : J’ai arrêté de regarder au bout de trois minutes. Faut dire que la présentation d’une console, ça m’intéresse nettement moins que de voir des jeux, et j’avais pas l’impression qu’on allait voir grand chose (sans compter qu’on perd une bonne partie de l’intérêt graphique du truc).
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C’est pas une question de cinéma ou quoi que ce soit, c’est vraiment que plot c’est l’intrigue, dans tous les domaines. Je sais pas comment le dire autrement, c’est comme si au bout de quinze ans on vient me dire que tusk ça veut dire éléphant, j’aurai forcément du mal à le croire. Je l’ai jamais entendu utilisé correctement d’une autre façon, les dicos sont du même avis, etc.
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En termes de techniques narratives le ciné c’est pas vraiment différent de la littérature. On a un élément supplémentaire (la réalisation / mise en scène) qui vient se greffer entre schéma narratif et action (disons que c’est une couche narrative de plus) mais c’est pas vraiment différent du théâtre par exemple. Ou des techniques employées dans le jeu vidéo (mais là il y a encore un élément supplémentaire qui vient s’ajouter, celui de “jeu”). Après le fait qu’on utilise des plans séquence, des métaphores ou des sprites ça ne vient pas changer grand-chose à ça.
Après pour ces histoires de définitions je crois qu’on touche là à un des problèmes essentiels du langage, qui est qu’un mot n’a pas forcément la même signification pour chaque personne :x
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Le jeu vidéo s’inspire pas mal du cinéma, donc c’est logique.
Par contre y a des trucs du cinéma du genre les ellipses qui sont, je pense, pas du tout gérée de la même manière au cinéma que dans un roman ou au théâtre. Mais sinon effectivement j’aurais tendance à penser que ça reste assez proche, ceci dit la dernière fois que j’ai dit ça un estudiantin et docte du septième art m’a tancé de manière rédhibitoire. : D Va savoir si c’était justifié ou non.
Camarade Chev : Ben je peux en dire autant ici. Bon ceci dit en soi ça constitue pas un argument, pour toi comme pour moi.
Pour moi narration ça a toujours concerné la structure d’un récit, que ce soit par le biais de mes études ou dans les discussions de tous les jours. Et jamais j’ai vu le terme intrigue servir à définir la manière dont s’agence une histoire. L’intrigue pour moi a toujours été l’identification et le relevé des grands arcs du récit. En soi l’intrigue est une composante de la narration d’ailleurs, qui est le truc global qui chapeaute tout ça.
Maintenant point de vue du langage courant, la majorité des gens, à mon avis, voient le terme intrigue comme un simple synonyme de l’histoire ou du récit. C’est ce qui me semble logique et c’est ce que j’ai toujours constaté. Je suis vraiment surpris que ce soit pas ton cas, et tu as donc maintenant au moins deux exemples de personnes qui appellent narration ce que toi tu appelles intrigue (si j’ai bien compris le message de Skarn qui a lancé la discussion). ^^
Après je cherche pas spécialement à te convaincre (j’ai l’impression que je commence à t’irriter ), je dis juste ce que moi j’ai pu constater, comme toi tu le fais. De base j’aurais même eu tendance à penser que j’avais peut-être une mauvaise définition de plot (ce que je soupçonne de plus en plus suite à cette discussion, et ce serait une vraie déception car j’aurais toujours mon terme privilégié pour cet aspect de la narration que j’aime tant, à savoir les chemins tortueux suivis par le récit , encore que j’ai des doutes en y retrouvant des traits typiques de ce que je voyais chez Genette), mais ce qui m’étonne donc c’est qu’a priori notre désaccord est plus général que ça et s’étend même jusqu’au terme de narration, par exemple.
“dans tous les domaines”
Ca par contre pour moi c’est difficile à appréhender. Selon le domaine, la traduction d’un mot va s’accompagner de traits propres à la culture associée à la langue, donc je pense pas qu’on puisse prendre pour référent commun, par exemple, le fait que dans le langage courant, plot signifie littéralement intrigue, pour pouvoir affirmer que dans tous les autres domaines la définition va être la même (je marche sur des oeufs là : je suis pas en train dire que c’est pas le cas dans le cas qui nous occupe, mais juste que ça me semble peu probable qu’une même traduction puisse s’appliquer à tous les domaines).
« Après pour ces histoires de définitions je crois qu’on touche là à un des problèmes essentiels du langage, qui est qu’un mot n’a pas forcément la même signification pour chaque personne :x »
Ben ouais mais est-ce que c’est pas censé être le cas ? Je vais pas lancer un autre débat HS sur ce topic car ça n’intéresserait qu’un petit échantillon de personnes et que les autres ont déjà bien assez subi , mais le but d’une langue c’est de communiquer, donc dans l’absolu un mot devrait pas avoir de sens différents pour telle ou telle personne (et je dis bien dans l’absolu, car je pense qu’il y a une barrière énorme constituée par le vécu et les sentiments qu’on peut éprouver vis-à-vis du signifié à définir, sans parler des évolutions que peut connaître un terme dans des langues vernaculaires de toutes sortes).
Par conséquent c’est bien parce que je considère que le but c’est la communication que je creuse à fond pour savoir si j’emploie ou non correctement un mot (et par correctement, j’entends surtout : si je serai compris de la majorité ^^).
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Je viens de finir Silent Hill Shattered Memories et, si mon opinion sur ce jeu était quelque peu mitigée au bout de la première partie (essentiellement a cause du gameplay, j’y reviendrai), ma seconde partie m’a fait me ranger à l’avis d’Aniki. Au niveau de l’ambiance et du scénario, c’est sans doute le meilleur Silent Hill depuis le 2, même si paradoxalement c’est celui qui a le moins de rapports avec les éléments usuels de la série (le monde alternatif cauchemardesque n’est plus fait de rouille et de sang mais de glace, pas d’effets visuels bizarres genre filtre crade, head twitch, ou bruits persistants, et globalement assez peu d’élements “effrayants” en fait). Notamment ça m’a fait voir les événements de SH1 et SH3 sous un angle tout à fait différent et, selon moi, carrément plus intéressant que le coup de “la secte qui veut invoquer un démon”. Par contre je m’attendais à de la narration éclatée, mais ça, y’a pas. C’est pas trop grave, le symbolisme c’est bien aussi. J’avais pas vu autant d’interprétations symboliques dans un survival (même si ce jeu n’en est pas vraiment un, en fait) depuis Rule of Rose, si ça pouvait continuer sur cette voie plutot que celle du casse-zombie habituel…
L’idée de faire réagir les éléments du jeu aux décisions du joueur grace aux tests psychologiques (le perso du psy est d’ailleurs assez grandiose) est assez bien vue, mais malheureusement ça ne se voit pas vraiment sur la première partie. Le jeu est censé créer un “cauchemar personnalisé” mais au final on se retrouve plutot avec un univers assez bizarre (mais pas forcément déplaisant… j’ai trouvé certains passages plus “mignons” que “horrifiques” :x). Sauf dans les phases en mode cauchemardesque, où là c’est vraiment l’horreur. Mais pas pour les bonnes raisons. Le monde de glace n’est pas spécialement effrayant (je le trouve même plutot joli, par rapport au cauchemar rouillé habituel), mais le gameplay de ces séquences est particulièrement à chier. On se retrouve a courir un peu partout sans vraiment savoir où on va, vu qu’on ne peut pas sortir sa carte sans se faire agresser par une douzaine de monstres (qu’on ne peut pas tuer, vu que le principe c’est de les fuir), et donc on se retrouve à refaire 3-4 fois chaque séquence jusqu’a ce qu’on sache à peu près quelle direction il faut prendre (le sens de l’orientation n’aidant pas vraiment, vu que la plupart des sorties menant “dans la bonne direction” sont bloquées). L’une de ces séquences, fonctionnant sur un mode “puzzle”, est plus sympa à jouer que les autres, parce que si on tourne en rond c’est simplement qu’on ne comprend pas la logique du truc, mais les autres se résument juste à foncer droit devant soi en espérant que la prochaine porte soit la bonne, c’est pas super bien vu. Je pense que ça aurait été plus intéressant de toutes les faire en mode puzzle.
Ah, et la plupart des énigmes sont assez nulles parce qu’essentiellement basées sur des contrôles gimmicks (blame the original wii version, I suppose), qui sont particuliculièrement chiants a effectuer sur PSP (je ne compte plus les fois où j’ai dû recalibrer mon stick avec tous ces 360).
Malgré les défauts (qui sont passés plus facilement sur la seconde partie, je dois dire), ça reste le meilleur jeu “d’horreur” que j’aie pu faire depuis un bail. Depuis Rule of Rose (2007?), en fait.
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L’idée de faire réagir les éléments du jeu aux décisions du joueur grace aux tests psychologiques (le perso du psy est d’ailleurs assez grandiose) est assez bien vue, mais malheureusement ça ne se voit pas vraiment sur la première partie.
Juste pour rapidement commenter ce point précis (car il est tard), je trouve justement que ne pas le remarquer est plus intéressant. C’est un peu la même chose que dans un Heavy Rain, en fait : ne pas connaitre les mécanismes exacts, ne pas savoir à quelle conséquence correspond quel choix (même s’il y a aussi des trucs dont la conséquence directe est flagrante, comme le test du coloriage) démultiplie l’immersion et la sensation de paranoïa, d’emprise sur le joueur, puisqu’à partir de là tout est possible. J’ai ressenti la forte impression d’être un pion observé et manipulé, donc un sentiment de malaise kafkaïen auquel je suis très sensible*, tel l’inquiétante étrangeté de Freud, une “peur” différente des autres Silent Hill (mis à part quelques scènes ponctuelles comme la scène du “labyrinthe aux grillages” dans SH3). Cela se joue surtout dans les détails, dans ce que tu peux rater, ce qui vit sans toi : je me suis souvent surpris à prêter attention aux affiches ou autres éléments du décor (tels des dessins d’enfant… dans un club porno, puisque j’ai beaucoup axé mes réponses sur le sexe) voire aux nombreuses conversations téléphoniques optionnelles, qui concordaient toujours avec mes choix. D’ailleurs, dans mon trip je me suis sans doute approprié des choses qui restent pareilles à chaque partie : il y a peut-être 70% du jeu qui sera toujours identique mais j’ai ressenti l’impression inverse. Le but n’est pas de tester les possibilités du programme mais de jouer le jeu. Enfin, là je parle de la première expérience, après pourquoi ne pas s’amuser à explorer les possibilités de manière plus empirique. A posteriori j’ai regardé sur le net toutes les variations possibles et je ne sais pas pour toi mais j’étais vraiment tombé sur les ennemis les plus softs (certains sont HORRIBLES).
*Je m’y intéresse énormément donc si quelques souhaite recommander des œuvres sur ce thème que je ne connaitrais pas (JV, litté, ciné, peu importe), en dehors des grands noms tels que Kafka/K.Dick/Lynch/Orwell/Cronenberg/... je suis toujours preneur. Je pense que cette obsession résume la raison de mon fanatisme absolu pour un jeu comme Portal (qui se rapproche pas mal de THX 1138 ou 1984, enfin pour ce dernier c’est surtout HL2), alors que niveau gameplay je le trouve juste bon.
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Bah justement je n’ai pas vraiment senti de “paranoïa” ou de quelconque “emprise” parce que justement je trouvais que ce sur quoi je tombais n’avais pas vraiment de rapport avec mes réponses, à part une ou deux scènes, et que l’ambiance globale était plus “bizarre” que “oppressante”. Notamment, dans ma première partie, j’ai noté la présence de nombreux éléments hypersexualisés alors que j’avais pas vraiment accentué ce domaine dans les phases de psy (mais il se trouve que comme toi j’ai passé ma première partie à détailler les éléments de décor et a appeler tous les numéros sur lesquels je tombais, et vu que la plupart de ceux-ci sont a connotation sexuelle…) et de plusieurs situations “chaotiques” (pièces en désordre, objets non appropriés aux lieux etc) alors que j’ai joué le jeu et répondu de façon plus ou moins honnête. Dans ma seconde j’ai voulu taper dans le trip schizo en pensant que ça allait être encore pire et j’ai été surpris de voir que c’était exactement le contraire, j’avais des persos et des décors plutot “normaux”...
Pour ce qui est des ennemis j’ai eu dans ma première partie des trucs assez cools qui semblaient être faits de “briques de chair” avec des espèces de couronnes. Dans la seconde j’ai eu des ennemis gangrenés de partout qui m’ont paru un peu plus classiques, mais plus crades. J’ai regardé des listes d’ennemis aussi et à part un ou deux trucs je trouve que la plupart sont quand même plutot soft par rapport à la “norme” de la série.
Sinon je ne vois pas trop le rapport entre des trucs dystopiques comme THX1138 / 1984 et Portal, qui me paraît plus inspiré des univers-pièges genre Cube (mais bon je fais aussi partie de ceux qui classent Portal dans la catégorie “highly overrated”). Ton avis là-dessus m’intéresse.
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Il y a aussi du Cube, certes.
Mais je pense qu’il y a davantage de THX 1138 là-dedans. La principale différence entre Portal et les trucs dystopiques est l’objectif de cette surveillance : un test scientifique d’une part, le maintien de l’ordre dans une société “idéale” de l’autre. Je considère que Portal pourrait être une espèce de préambule à l’établissement d’une société à la 1984, une série de tests d’obéissance et de conditionnement (si tu as lu 1984, pense à son dernier tiers). N’oublions pas que le jeu se déroule dans le même univers qu’Half Life 2, partiellement sous emprise totalitaire (le début de HL2 dans la Cité 17 est à 200% une référence à 1984).
D’un côté comme de l’autre il existe une tentative de libre arbitre, cette volonté de s’échapper, de ne pas s’arrêter à ce que l’autorité attend de nous, de découvrir l’envers du décor, qui est en fait un monde délabré derrière une pureté artificielle (cf. les fins de THX 1138 / Portal). Dans toutes ces oeuvres on retrouve en quelque sorte un duel “libre arbitre VS. déterminisme”.
Ensuite, d’un point de vue formel les ressemblances sont évidentes : l’univers lisse, blanc, propre et contrôlé, les injonctions d’une autorité supérieure artificielle (GladOS / Big Brother / les IA de THX), ce sentiment d’être en permanence observé (les caméras, les salles d’observation… vides, ce qui augmente l’angoisse, le sentiment d’absurde et d’illogisme propre au Procès de Kafka, par exemple, mais là je dévie un peu).
Après, ce ne sont évidemment pas les seules références, on peut aussi citer du 2001 (HAL-1000) ou, d’un point de vue esthétique, le clip All is full of love de Chris Cunnigham pour Björk. C’est tout ce que j’aime, donc forcément je ne pouvais qu’adhérer. Evoluer dans ce type d’univers où prédomine l’impression de perdre tout libre arbitre me fascine au plus haut point. Ensuite j’y distingue 2 sous-catégories : les univers rationnels (1984, THX 1138) et les univers irrationnels (Kafka, Silent Hill). Portal, c’est un univers rationnel avec ce soupçon d’incompréhension (les salles vides, donc, ou les petites radios et plus généralement les zones détruites / à l’abandon) qui en fait quelque chose de relativement angoissant.
Après, tout ce qui est mécanique des portails, “the cake is a lie”, chanson “Still Alive”, companion cube, etc., c’est très bien et ça forge une identité au jeu mais ce n’est pas ce qui m’a intéressé. D’où le fait que je sois à la fois réjoui et sceptique quant à Portal 2. Je n’aimerais pas un simple rab de niveaux entouré d’une atmosphère et de gimmicks c/c du premier jeu.
Petit HS post-scriptum : tu te demandais il y a quelque temps pourquoi j’estimais autant Mirror’s Edge, et bien cela s’explique entre autres par son magnifique univers dystopique tout beau tout propre, ça marche toujours sur moi (inutile aussi de préciser que je suis + friand d’un Le Corbusier que d’un Brunelleschi), même si pour le coup ils ont assez raté et sous-exploité cet aspect (la forme est bien, mais le fond…). Ca, et le concept du body awareness / first person platformer qui pour moi est une excellente idée et m’a procuré des sensations inédites.
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Je n’ai pas fait Half-Life 2, donc je prenais Portal dans son individualité (vu que les références à Black Mesa et compagnie me paraissaient plus à mettre du côté des easter eggs avec le cake et toute la clique). Or pour moi l’élément le plus important d’une oeuvre dystopique la mise en place d’une négation de l’individu au profit d’un système (généralement suivie par une rébellion). Je n’ai retrouvé ni l’un ni l’autre dans Portal. On pourrait considérer GladOS comme le “système” compte tenu du fait que c’est elle qui détient le pouvoir sur le lieu de l’action, mais dans le jeu elle est plutôt présentée comme une instance antagoniste singulière, une sorte de “princesse gâtée” dont la caractérisation insisterait plus sur le côté maniaque et l’ego que sur le côté “figure de pouvoir”. Dès lors je vois plus ce jeu comme une sorte de “duel” entre GladOS et son “jouet” que comme la rébellion d’un individu contre un système.
Sinon au niveau visuel justement, je n’ai pas vraiment retrouvé dans Portal ce côté lisse, vide et aseptisé qu’on trouve dans THX. Au contraire, j’ai plutôt vu le délabrement et le chaos, un peu comme si on arrivait après la bataille, que s’il y avait eu rébellion dans un éventuel univers dystopique, on avait oublié de se réveiller ce jour-là.
En ce qui concerne Mirror’s Edge, autant j’ai accroché direct à cet univers au visuel minimaliste et au thème à la Yamakasi enfin débarrassé de ses Bessoneries, autant le gameplay m’a refroidi direct. Je n’ai trouvé aucune différence entre les phases de plate-forme de Mirror’s Edge censées “renouveler la perception du corps du perso” (c’est pas parce qu’on voit un bras et une jambe de temps en temps que c’est différent d’une vue FPS toute conne) et les immondes phases de plate-forme injouables à la fin de Half-Life. Après je n’aime ni la vue FPS, ni la plate-forme 3D, donc ce jeu n’était sans doute pas fait pour moi à la base.
Accessoirement pour tout ce qui est univers irrationels, tu as regardé du côté de Suda51? Ce n’est pas le thème principal de ses jeux mais beaucoup ont une ambiance assez kafkaïenne (d’ailleurs je crois qu’il voulait faire une adaptation JV du Château à un moment °_0). L’année dernière j’ai notamment fait Flower Sun and Rain, où le protagoniste semble être condamné à répéter inlassablement la même journée (genre Groundhog Day, mais en pas drôle), et où l’univers devient de plus en plus bizarre autour de lui. Si tu es capable de passer outre les graphismes complètement dépassés, le gameplay parfois lourd et les inévitables répétitions qu’un scénario de ce type engendre, je ne peux que te le conseiller.
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Concernant Portal : le système existe, Aperture Science n’est pas dirigé par GladOS. Bon, au moment où se déroule le jeu il n’y a plus personne dans les locaux (ce qui est bizarre ! même pas de cadavres ni rien) mais ce n’est pas elle qui a mis au point les épreuves. Sinon euh tu trouves franchement la première moitié du jeu chaotique ? :o On fait difficilement plus propre et rangé je trouve. Bon, niveau teintes ce n’est pas tout tout blanc comme dans THX (probablement pour mettre en évidence les volumes). Ca c’est pour l’agencement et les couleurs, ensuite effectivement ont voit légèrement dans les textures que les lieux ont un certain âge mais je ne vois pas de trace de chaos dans ces salles (je ne parle pas du moment où l’on commence à apercevoir l’envers du décor). Portal 2, là par contre c’est exactement ce que tu décris.
Mirror’s Edge : la perception du corps ce n’est pas que voir les bras et les jambes mais aussi aussi et surtout entendre la respiration, le vent, ressentir les accélérations et la gravité, voir ce que voit Faith (il suffit de comparer une chute dans un FPS lambda par rapport à celles de ME), ça va jusqu’à la gestion de la netteté de l’image en fonction du point de focus. Moi ça m’a bluffé, même si depuis d’autres l’ont fait.
Pour Suda, je possède Killer7, qui a une ambiance et des idées extraordinaires même si je le trouve plombé par son gameplay, vraiment atroce ! Je vais probablement me prendre le remake PS3 de No More Heroes même si j’ai l’impression que c’est déjà beaucoup plus convenu. Flower Sun and Rain, je ne connaissais pas, je vais m’y intéresser ! (mais a priori si c’est sur DS je ne pourrai jamais le faire…)
L’idée de départ me fait penser à Every Day the Same Dream que j’adore, même si pour le coup ça n’a rien de particulièrement “bizarre”. Tu as fait Michigan : Report from Hell ? L’idée a l’air cool.
(le projet d’adapation du Château : http://suda51.wikia.com/wiki/Kurayami)
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Le début de Portal je m’en rappelle comme “un entrepôt avec des caisses” mais bon je n’ai fait le jeu qu’une fois et il y a longtemps, ma perception s’est peut-être faussée depuis.
Sinon concernant Suda51 le gameplay de ses jeux est souvent mal foutu il est vrai (ce qui explique probablement le relatif manque de succès de ses jeux). No More Heroes est plus dans un trip parodique, même si on trouve quelques éléments étranges et des passages où la narration part complètement en live. Flower Sun and Rain (qui est en fait un remake DS d’un jeu PS1 n’ayant jamais quitté le Japon) est plus proche par son ambiance de Killer7.
Je n’ai pas fait Michigan sinon, tout simplement parce que je n’ai jamais pu le trouver. L’idée derrière Everyday the Same Dream est intéressante sinon, mais je bloque sur la dernière phase ;((
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Un article bien complet à propos de Michigan, qui témoigne entre autres de l’adaptation EU tronquée et ratée (sans regret, donc) : ici
(mais si jamais il est dispo sur Amazon UK)
Pour Everyday, euh ben ya des soluces
Il y a aussi un jeu similaire (limite un plagiat) mais qui contient lui aussi de bonnes idées : One Chance
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