Suikoden est apparu sur la première PlayStation. Le jeu techniquement limité et dépassé attira à lui de nombreux joueurs curieux de voir ce que Konami avait à proposer. Un second épisode sorti plus tard consolida, par ses qualités scénaristiques et par son gameplay rôdé, la réputation du titre en faisant de Suikoden une grande saga du monde des RPG. Un troisième épisode se devait donc de répondre au succès du 2 et fut développé à nouveau par KCET mais cette fois-ci sur la nouvelle génération de consoles avec la PlayStation 2 comme support. Suikoden 3 est l’un des premiers RPG à être sorti sur le monolithe noir de Sony, et il faut bien dire que la saga change quelque peu de ton et bénéficie par ailleurs des capacités techniques de la PlayStation 2 ce qui pourrait augurer du meilleur comme du pire…
Ce troisième épisode propose toujours une aventure épique parsemée de guerres, de conflits et de trahisons. L’histoire prend place cette fois-ci 15 ans après le second opus et nous fait voyager à Grassland où la Fédération de Zexen, une cité marchande, et les Six Clans des Grassland (composés des humains, des canards et des lézards… mélange délirant mais on s’y habitue) s’affrontent. Très vite des phénomènes inexplicables se produisent et le proche Saint Royaume d’Harmonia vient se mêler à l’affaire pour la domination de Grassland. C’est alors qu’une rumeur se répand, un grand héros nommé le Flame Champion qui avait mis fin à la guerre il y a 50 ans serait de retour avec ses hommes les Fire Bringers pour unir Grassland, et repousser l’envahisseur afin de ramener la paix. Vous allez donc partir à la recherche d’informations sur ce fantôme des temps passés qui pourrait vous aider à sauver votre terre. Aussi parallèlement un groupe mystérieux (quelques persos connus y figurent, devinez un peu qui sont le charismatique Masked Bishop ou encore l’homme en noir) tente de rassembler des True Runes dans un but inconnu et n’hésite pas à utiliser la violence. Les thèmes évoqués sont assez durs (racisme, guerre…) et une certaine mélancolie se ressent énormément. Côté mise en scène, l’épisode innove avec un concept intéressant qu’est le Trinity Sight System. Adieu le héros unique et muet, bonjour la découverte de l’aventure sous 3 angles différents pour chacun des 3 personnages principaux. Ainsi vous serez Hugo, le fils de Lucia, chef du Clan Karaya, Geddoe, un mercenaire d’Harmonia ou encore Chris, capitaine des chevaliers de Zexen et considérée comme un grand héros national. Le jeu se déroule en chapitres et permet d’avancer de la manière que l’on veut dans l’histoire. Ainsi on découvre ce que fait l’un des personnages pendant qu’un autre poursuit son périple dans d’autres lieux. Cela permet d’explorer à fond le monde, d’approfondir la psychologie des personnages mais aussi l’interaction entre eux. Suivant les choix du joueur, l’histoire sera légèrement modifiée et certaines scènes ne pourront être vues qu’avec un personnage précis. Par la suite il vous faudra choisir votre héros.
Comme toujours l’un des buts est de réunir les 108 étoiles de la destinée. Ainsi vous pourrez recruter jusqu’à 108 personnages qui viendront dans votre équipe grâce aux aléas scénaristiques ou alors après avoir rempli une quête particulière. Dans cet épisode il semble plus facile que dans les autres de les rassembler. Il vous les faudra tous si vous voulez avoir une fin potable, car la normale vous fera pleurer de par sa nullité. Le jeu pendant les 3 premiers chapitres de chaque protagoniste met en scène le monde et les guerres entre les régions de Grassland. Rien de bien fabuleux et la dynamique est presque inexistante. Le jeu fourmille de détails et de références. Évidemment les fans seront ravis de retrouver l’ambiance Suikoden et certains personnages du second épisode mais aussi de Suikogaiden ou encore les grandes familles (Silverberg…). D’ailleurs on peut charger les sauvegardes de Suikoden 2 afin de débloquer des petits bonus en cours de partie. Mais la magie ne s’opère pas dès le début. L’ennui prend bien vite le dessus, surtout dans les 2 chapitres de Thomas où votre patience sera mise à rude épreuve. Il n’y a pas de grands rebondissements, on ne fait que des allers-retours pour vérifier des rumeurs. Heureusement le jeu devient intéressant et jouissif au quatrième chapitre. A partir de là les révélations s’enchaînent et on retrouve le réel esprit Suikoden avec ses oppositions de personnages et les grandes luttes. L’aventure est donc assez inégale, mais on retrouve un scénario de qualité (même si l’on n’atteint pas le niveau du 2). Le jeu est le plus long de la saga et il faut compter environ 40 à 50 heures pour en arriver à bout.
Les personnages sont peu développés. Seuls les principaux protagonistes bénéficient d’un grand travail d’approfondissement. La plupart des 108 étoiles sont inintéressantes. Heureusement que les héros relèvent le niveau.
C’est un jeune homme qui est le fils unique de Lucia, le chef de la tribu Karaya, un des Six Clans de Grassland. Il a un tempérament vif et joyeux et essaie toujours d’aider les autres. Il n’est pas très intéressé par le conflit qui se joue entre Zexen et les Clans. Mais il est rapidement mêlé à la guerre à partir du moment où sa mère lui demande de délivrer une lettre au conseil Zexen. Il traîne toujours avec ses amis que sont Lulu, un jeune garçon, le Sergent Joe, un canard susceptible et puissant, ainsi que Fubar, un griffon. En combat, Hugo n’est pas le plus fort des personnages mais devient un redoutable guerrier très rapide et capable de placer 4 attaques d’affilée. Il possède au début du jeu une Wind Rune très utile.
Cette charmante jeune femme fait parti de la célèbre famille Lightfellow de la ville de Vinay del Zexay dans la Zexen Federation. Elle recherche son père et fait parti des Zexen Knights dont elle est la Capitaine. Elle est souvent arrogante envers le Conseil car elle ne déteste pas ses ennemis Grasslanders. Elle est obligée de faire les choses à contre-coeur. A Zexen elle est considérée comme un grand héros mais cela l’énerve que les gens lui donnent autant de valeur. Elle est aussi connue sous le nom de Silver Maiden ou encore de White Hero. En combat, Chris est forte en attaque mais très lente. Elle peut encaisser beaucoup de dégâts et arrive souvent à attaquer plusieurs fois. Mais elle n’est pas vraiment bonne dans l’utilisation des Runes bien que sa préférence aille à la Water Rune.
Il est le commandant de la 12ème unité de mercenaires d’Harmonia. Il a pour mission d’espionner le conflit entre Zexen et les 6 Clans de Grassland. Geddoe est un personnage froid, mystérieux et semble connaître beaucoup de choses. Il est rapidement mêlé à la guerre. En combat, Geddoe est plutôt rapide et puissant en attaque. De plus, il est habile avec les Lightning Runes et peut faire d’énormes dégâts.
Contrairement aux autres Suikoden ici vos personnages évoluent sur une carte 2D où les endroits importants sont représentés par des points à l’instar du système de FFT. Après avoir sélectionné un point vous vous retrouvez à batifoler dans des décors en 3D. Comme dans FFX une petite carte vous indique le chemin et les passages d’une zone à l’autre. On se retrouve souvent à repasser par les mêmes endroits ce qui lasse un peu. Le château est toujours présent, néanmoins on a moins de temps à donner au développement de celui-ci.
Quant au système de combat on pouvait s’attendre au pire mais en réalité Suikoden 3 peut se vanter d’apporter un peu de fraîcheur par rapport à ses grands frères. Certes les innovations ne sont pas nombreuses mais bien pensées. Les deux premiers Suikoden nous avaient montré des combats rapides, dynamiques avec une facilité plutôt déconcertante ainsi que des magies utilisables grâce aux Runes qui donnent aux personnages un certain nombre de techniques magiques spéciales. Ici un petit côté tactique vient s’ajouter à tout cela. En effet, votre équipe comportant 6 personnages s’organise par paires. Par exemple, si vous demandez à une paire de combattants d’utiliser une Rune, celui qui l’aura équipée se mettra à faire son sort pendant que l’autre attaquera les ennemis automatiquement vu qu’il ne lui a été donné aucun ordre spécifique. Certains monstres n’aiment pas qu’on les attaque et cela peut être par exemple mauvais pour vous. Aussi les personnages se déplacent sur le terrain et restent à leur place à la fin du tour. Ainsi il faut savoir bien gérer les attaques qui se font sur une certaine zone ce qui renforce aussi le côté stratégique. Les personnages de votre équipe peuvent toujours s’allier pour faire des combos ensemble. Autre nouveauté majeure : le système de skills. A la fin des combats vous gagnez des points spéciaux qui vous permettent d’apprendre des techniques à vos personnages et de monter ces attributs de niveaux. Vous pouvez donc rendre vos personnages plus puissants et résistants. Les skills sont individuels ce qui permet de personnaliser les combattants. En combat vos actions peuvent maintenant prendre un certain nombre de tours ce qui est gênant quand c’est trop long. Alors vous pouvez booster par exemple grâce aux skills votre utilisation des Runes afin de faire des magies plus puissantes et plus rapidement (ce qui est utile pour aller vite et pour ne pas que l’incantation du sort ne soit annulée par un ennemi qui aura un peu trop touché votre personnage). Les personnages ne sont toujours pas ressuscitables en combats et se customisent toujours dans les villages où l’on trouve des boutiques spéciales.
Les duels sont toujours présents, bénéficient du moteur de jeu, et sont plus nombreux et plus dynamiques qu’auparavant. Vous pouvez toujours attaquer, vous défendre ou utiliser une attaque spéciale. Les phases stratégiques comme dans un wargame où l’on déplace nos unités sont toujours présentes elles aussi. Cependant on peut regretter que les petits guerriers hurlants des deux premiers Suikoden aient été remplacé par des phases de combat où l’on voit 6 personnages contre des ennemis comme dans des combats normaux. On n’a moins l’impression d’avoir une armée. La difficulté est haute et toujours présente, il faut bien savoir gérer les différents aspects des combats. Au début tout semble confus mais au final la diversité et l’ingéniosité des combats donne à ce Suikoden 3 un bon point. A certains endroits on peut trouver de puissants monstres affichés sur la carte et qui gardent des coffres remplis de richesses. Ces sous-bosses sont une bonne chose pour le level up mais aussi pour gagner rapidement de l’argent. Mais gros point noir, il y a trop de batailles que l’on est obligé de perdre. Et détail amusant, la première phase stratégique avec Chris est bugguée ce qui fait qu’avec une astuce spécifique on peut faire monter le personnage jusqu’au niveau maximal en un rien de temps.
Niveau graphismes c’est un véritable choc pour un fan de Suikoden. Le passage à la 3D ne s’effectue pas aisément, et le jeu nécessite un petit temps d’adaptation. On se retrouve devant un jeu mignon, aux couleurs pastel et aux textures unies assez laides. De plus il y a un fort aliasing. Les magies sont souvent immondes, surtout celles de feu que l’on pourrait croire tout droit sorties d’un jeu PlayStation avec une pixellisation horrible. Le design des personnages est bon même si la plupart font niais au possible. Néanmoins les personnages principaux bénéficient d’une grande attention dans le design. Le rendu Super Deformed n’est pas du plus bel effet et l’animation est tout aussi ratée avec des personnages rigides. Mais le look manga est intéressant car il donne une grande et diversifiée expressivité du visage. La modélisation des éléments 3D est vraiment juste. Les monstres quant à eux sont laids et peu originaux. On ne peut pas contrôler la caméra et cela est extrêmement gênant vu que beaucoup d’angles de vue sont mal placés. De plus, le jeu rame énormément quand il y a trop de personnages à l’écran. Techniquement le jeu est donc assez limité. Les lieux que l’on visite sont acceptables mais pas transcendants. On a une grande impression de profondeur. On retiendra quand même les Cyndar Ruins qui restent un lieu extrêmement beau et envoûtant. Musicalement c’est la grande déception. Rien de bien remarquable, les thèmes sont très discrets et souvent réutilisés. Ils sont néanmoins sympathiques à écouter. L’introduction du jeu reste la meilleure piste ce qui est bien dommage. On est bien loin des compositions celtiques et endiablées d’Higashino sur Suikoden 2.
Le constat est donc plutôt mitigé. Ce premier essai sur une console nouvelle génération est assez controversé. Techniquement il est déjà limité et souffre de nombreux problèmes. Artistiquement il souffre d’un manque d’imagination mais l’esprit Suikoden est tout de même présent. Les combats sont très bons et le scénario est toujours aussi riche mais malheureusement l’évolution dans le jeu se fait trop lentement. Le jeu aurait mérité mieux tant les deux premiers épisodes étaient réussis. C’est donc un RPG moyen qui saura tout de même ravir les fans de la saga. Pour le néophyte l’achat d’un tel jeu ne vaut peut être pas le coup, trop de références ne seraient pas vues et l’intérêt pour le soft serait bien bas. Il faut espérer que les épisodes suivants sauront pallier ces différentes difficultés.
Ecrit par Daku le 14 novembre 2004 | Modifié le 04 février 2008